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Die Linke, un parti comme les autres ?


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Publié initialement le Mittwoch, 11. Februar 2015
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25 ans après la chute du mur de Berlin, un membre de die Linke issue en partie de l'ex parti communiste de la RDA a été élu Ministre-président de la Thuringe. Pour les uns, c'est une nouvelle étape dans la réunification allemande. Pour d'autres, une relativisation des crimes commis par la RDA. Décryptage.



 
L'événement a électrisé médias et politiques outre-Rhin: l'élection pour la première fois le 5 décembre dernier d'un Ministre-président issu du parti die Linke dans le Land de Thuringe, en Allemagne de l'est. Alors qu'on venait tout juste de célébrer le 25ème anniversaire de la chute du mur, le parti de la gauche radicale issu de la fusion entre le PDS, héritier de l'ex parti communiste de la RDA, et du WASG, une formation regroupant des syndicalistes et altermondialistes à l'ouest constituait avec le parti social-démocrate et les Verts une coalition dans une région rurale forte d'une grande communauté catholique. Dans les semaines qui ont précédé la signature du contrat de coalition et l'élection de Bodo Ramelow, beaucoup, y compris le président de la République Joachim Gauck, se sont indignés de voir arriver au pouvoir un parti qui selon eux n'a pas pris suffisamment ses distances avec les crimes commis par la RDA. Lors d'une cérémonie de célébration des 25 ans de la chute du mur au Bundestag, le poète, auteur-compositeur Wolf Biermann, chassé de la RDA en 1976, avait qualifié die Linke de "reste misérable de la couvée du dragon", les accusant par là d'être les héritiers de la dictature communiste. En même temps, nombre d'experts ont souligné qu'il s'agissait d'une étape supplémentaire dans le processus de réunification de l'Allemagne. Cette élection d'un Ministre-président de die Linke "n'est pas vraiment une surprise", souligne Gero Neugebauer, politologue à l'Université libre de Berlin. La gauche radicale enregistre depuis longtemps de bons résultats en Thuringe, comme dans le reste de l'Allemagne de l'est. Aux élections régionales de septembre 2014, die Linke s'était classée numéro 2 avec 28,2 % des voix, derrière la CDU qui obtenait 33,5 %. En fait, "On s'attendait plutôt à ce que ce type de coalition rouge rouge verte émerge d'abord en Saxe Anhalt", explique le politologue. Dans ce Land voisin, une coalition SPD Verts avait déjà pu gouverner avec l'appui du PDS en 1998.

Domaine réservé de la CDU 

Toutefois, la Thuringe était depuis la réunification un domaine réservé du parti chrétien démocrate (CDU) et les conditions économiques étaient plutôt favorables : chômage bas (7% en novembre dernier), croissance du PIB un poil supérieure à la moyenne nationale en 2013 avec 0,5 %. Une situation que résumait die Zeit en titrant un article sur l'élection du nouveau Ministre-président : "Bodo le rouge, pays noir". Mais la Ministre-présidente Christine Lieberknecht (CDU), première femme à avoir accédé à ce poste, n'a guère brillé lors de son mandat (2009-2014). "Le prestige d'Angela Merkel n'a pas rejailli sur la Thuringe", remarque M.Neugebauer. Quant au parti social-démocrate, il s'est comporté comme "le valet de la coalition". Le succès de die Linke et son accession au poste le plus prestigieux à l'échelle d'une région tiennent surtout au caractère et aux compétences de son principal artisan, Bodo Ramelow. Cet ancien syndicaliste de confession protestante, qui a grandi en Hesse (ouest) a obligé son parti à se faire violence en inscrivant dans le contrat de coalition que "la RDA n'était pas un État de droit" ce qui a provoqué des tensions au sein de la gauche radicale mais a levé le principal obstacle à la constitution de ce gouvernement. A l'image de nombreux responsables de la gauche radicale à l'est, Bodo Ramelow est un pragmatique, un ambitieux qui souhaitait avant tout accéder aux responsabilités. De plus sa socialisation à l'ouest lui a permis de prendre plus facilement ses distances avec l'ancien parti communiste de l'est. Il connaît en outre, cette région depuis près de deux décennies puisqu'il y a été envoyé aux débuts des années 1990 en Thuringe pour y bâtir la fédération des syndicats allemands (DGB). "Il va mener une politique orientée sur le consensus", affirme Gero Neugebauer. D'ailleurs le programme de la nouvelle coalition pourrait tout à fait provenir du parti social-démocrate : relance au niveau fédéral de l'impôt sur la fortune, gratuité de la première année de crèche, emploi public subventionné. 


Perspectives des élections législatives de 2017 

Le nouveau chef de la Thuringe veut montrer que die Linke est capable de gouverner dans la perspective des élections législatives de 2017. A cette date, émergera peut-être pour la première fois un gouvernement fédéral composé de die Linke. Une perspective à laquelle tout le monde pense sans le dire vraiment ouvertement. Si officiellement, le président du SPD et ministre de l'Économie Sigmar Gabriel ne s'est pas exprimé sur la situation politique en Thuringe, il espère "que l'image de ce parti évoluera de façon à ce qu'il soit considéré comme un parti normal", assure Gero Neugebauer. "C'est un pas vers la normalité, cela va changer le parti", commente Klaus Ernst, vice président du groupe parlementaire die Linke. Selon lui, le parti va devoir faire preuve de davantage de discipline, devra savoir ce qu'il veut". Même si die Linke a affiché une certaine unité ces derniers temps, le parti a toujours été en proie à des luttes intestines entre les partisans d'une politique pragmatique qui souhaitent gouverner et ceux qui préfèrent rester fidèles à leurs idéaux en restant dans l'opposition. Bodo Ramelow incarne la ligne pragmatique et facilite ainsi le rapprochement avec le SPD. Reste que les divergences notamment en matière de politique étrangère sont immenses. Die Linke s'oppose à tout envoi de troupes à l'étranger, est opposée à la livraison d'armes aux populations kurdes pour lutter contre l'État islamique (EI) et s'oppose à des sanctions contre la Russie. "Il est plus facile de mener une telle coalition au niveau de la région", reconnaît Klaus Ernst. Le chemin vers une coalition fédérale reste encore semé d'embûches.
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