Le vendredi 8 décembre 2017, le comité chargé de désigner le lauréat pour le prestigieux Prix Charlemagne 2018 en Allemagne a attribué son prix au président français pour « sa vision forte pour une nouvelle Europe » et pour son discours « Initiative pour l’Europe, une Europe souveraine, unie, démocratique“ prononcé à la Sorbonne, le 26 septembre à Paris.

 

Le 22 janvier 2018, le duo franco-allemand, représentant près de 30% de la population européenne, va commémorer les 55 ans du Traité de l’Élysée. Par ce Traité, les sociétés civiles françaises et allemandes se sont emparées des structures de coopération interétatiques, pour prendre part à un destin politique, économique, culturel commun, symbolisé par les Conseils des ministres franco-allemands. Le 22 janvier 2003, le Conseil des ministres franco-allemands a pris deux mesures très importantes:

 

1) « Afin d’améliorer la connaissance réciproque des pratiques administratives et l’efficacité de notre travail en commun au sein des administrations publiques de nos deux pays, nous demandons à nos ministres de généraliser l’affectation de fonctionnaires auprès du pays partenaire… (échanges de fonctionnaires entre les administrations) et

 

2) de mettre en place des formations conjointes, particulièrement pour l’encadrement. Nous les invitons également à intégrer dans leur équipe, au sein de leur cabinet, un ressortissant du pays partenaire. Nous invitons également les collectivités territoriales à mettre en place de tels échanges ».

 

Le Master Européen de Gouvernance et d’Administration (MEGA) a été créé dans ce contexte en 2005 et a déjà accueilli neuf promotions soit 150 personnes au total.

 

Orienté vers la pratique, le programme MEGA permet à de jeunes cadres supérieurs des secteurs publics et privés d’acquérir une connaissance approfondie des administrations française, allemande et de l’Union européenne, d’être initiés aux nouvelles méthodes de gouvernance et de gestion du service public et à la gestion de crise et à la communication publique. Ce programme contribue à la constitution d’un réseau européen de jeunes cadres motivés et bien formés avec une intelligence interadministrative et interculturelle. Le MEGA, un Master exécutif destiné à l’encadrement supérieur du secteur public, unique en son genre, gagnerait à être plus connu, que ce soit des politiques qui pourraient se reposer sur ses diplômés, ou encore des services de relations humaines des ministères, que ce soit en France ou en Allemagne, et plus généralement en Europe. Ainsi, alors qu’un outil efficace est à même d’apporter l’intelligence interculturelle nécessaire au pilotage pratique de la coopération franco-allemande et existe depuis plus d’une décennie, de nombreux diplômés, experts de la coopération administrative européenne, retournent -à l’issue de leur formation- à des tâches nationales. Un vivier de compétences et de talents franco-allemands et européens existe. Il reste méconnu des leaders politiques, alors même que leurs mandats courent sur quelques années au plus, et qu’ils auraient intérêt à s’appuyer sur leur expertise, afin d’éviter les faux-pas culturels et d’anticiper les mécanismes administratifs des partenaires.

 

En effet, aujourd’hui encore et malgré l’apparente uniformisation que la globalisation économique semble produire depuis deux d��cennies en Europe, il existe des différences culturelles notables entre les cultures française et allemande. Les « chocs culturels » franco-allemands existent encore bel et bien, tels qu’on peut les voir illustrés dans « Alice au pays des projets » par Robert de Quelen et David Colliquet. Le secteur public n’est pas épargné par ces défis interculturels de part et d’autre du Rhin : il demeure des différences significatives dans les cultures administratives entre l’Allemagne et la France qui ont une influence importante sur la coopération et qui exigent une vigilance et un traitement particulier. Dans presque tous les domaines il existe des différences : que ce soit dans les relations interpersonnelles (entre le supérieur et son subordonné), dans les rapports au pouvoir, au savoir, à l’information (notamment s’agissant de son partage), ou bien dans la conduite de projet, les Allemands et les Français partent de positions diamétralement opposées. Ces différences culturelles administratives expliquent les difficultés que peuvent encore rencontrer les acteurs administratifs français et allemands en 2018. En prendre conscience est indispensable pour une coopération franco-allemande approfondie.

 

Nous disposons maintenant d’une génération de fonctionnaires bilingues et biculturels qui connaît les structures administratives de l’autre pays, y a vécu, parle sa langue et peut discuter de sujets de son terrain d’expertise ou en faisant appel à sa capacité d’adaptation et son intelligence interculturelle sur des sujets nouveaux. Ils croient en l’Europe, sont motivés et sont disponibles pour participer activement au renouveau et à la refondation européenne. En conséquence, ils peuvent être intégrés dans des équipes pluridisciplinaires et binationales pour mettre en œuvre et faire vivre les initiatives prises au niveau politique. Mais ils représentent encore un réseau qu’il nous faut agrandir, cibler encore plus et améliorer grâce à la multiplication des expertises administratives sur des politiques franco-allemandes et européennes. Une sensibilisation des responsables qui mettent en place les futurs projets décidés lors des conseils des ministres franco-allemands est indispensable.

 

Les fonctionnaires et agents publics français et allemands, anciens élèves de la 8e promotion 2015-16 « Louise Weiss » du MEGA :

 

Dr. Felix Bark

Karine Brard-Guillet

Hélène Foreau

Sebastian Gröning von Thüna

Dr. Véronique Héon-Klin

Sarah Périé-Frey

Morgane Tanguy

Murielle Taraud

Karl Terrollion

Dr. Christiane Trampisch

Par Redaktion ParisBerlin le 25 janvier 2018